Ongi etorri. Bienvenue en Euskal Herria, pays de la langue basque.
Après 8h de train et des correspondances pleines d’adrénaline, nous arrivons à Bayonne avec des fourmis dans les jambes. A peine les vélos remontés sur le quai de la gare et nous voilà partis, direction Saint-Jean-De-Luz. Nous suivons la Vélodyssée, longue piste cyclable longeant la côte Atlantique de Roscoff à Hendaye. La voie est partagée avec les piétons : le dernier dimanche d’août à l’heure du retour des plages, sans grande surprise, c’est une purge. Mais les paysages, bien que très urbanisés, nous donnent un avant-goût plutôt engageant de ce qui nous attends pour les jours à venir. Une pinte de cidre sur la plage de Lafitenia face au soleil couchant nous confirme que maintenant, les vacances peuvent commencer.
En temps normal, une passerelle permet de traverser la Bidasoa entre Hendaye et Irun pour passer la frontière espagnole. Mais le variant Delta est bien installé et les autorités craignent une quatrième vague. Il faudra passer par l’ancien poste frontière, gardé par un seul agent français, complètement débordé face à des migrants d’un jour inquiets. Les règles sont floues, et l’atmosphère tendue nous rappelle que nous vivons encore une situation inhabituelle qui peut dégénérer du jour au lendemain. Nous croisons les doigts. Nous ne le savons pas encore mais heureusement, le pic de la quatrième vague est déjà passé et le second passage de la frontière deux semaines plus tard se fera de façon beaucoup plus détendue. Le contraste entre les deux rives de la Bidasoa est saisissant : au nord, une agglomération touristique très huppée. Au sud, des boutiques de tabac et alcool à bas prix alignés le long de la frontière et une ville à l’urbanisme peu engageant. Nous traversons Irun rapidement pour arriver au magnifique cap de Higuer, point de départ de trois célèbres itinéraires de randonnées espagnols : la transpyrénéenne (GR11), la route du flysch (GR121) et le Camino del Norte, variante littorale réputée la plus belle et la plus difficile parmi les différents itinéraires du chemins de Saint-Jacques de Compostelle. C’est le chemin que nous suivrons en partie les prochains jours.
Sur le Camino del Norte
Notre première nuit en Espagne au camping du cap de Higuer est épuisante. On a plus l’impression d’être dans un camping de festival qu’au départ du GR11 : plusieurs groupes autour de nous passent la nuit entière totalement ivres à chanter, hurler des « joder », « maricon » et autres jolis mots. Heureusement que nous sommes arrivés un lundi et pas le weekend. Un peu déçus et très fatigués, nous décidons que nous bivouaquerons au maximum sur la côte pour éviter de réitérer ce genre d’expérience.
La traversée du Jaizkibel efface ce mauvais souvenir. Les petites pistes tranquilles avec vue sur les Pyrénées d’un côté et l’Atlantique de l’autre, c’est ça que nous aimons. Surtout quand au bout d’une longue descente raide nous arrivons sur une crique magnifique, où deux arbres semblent avoir été plantés exprès pour que nous y attachions nos hamacs pour notre première sieste espagnole. Le rythme est déjà pris.
Fin d’après-midi, il faut repartir. Nous embarquons nos vélos sur la barque qui fait la navette entre Pasaia et San Sebastian. Sur la carte, nous avons repéré une colline boisée à proximité de la station balnéaire la plus huppée d’Espagne, résidence d’été de la famille royale. Nous aurions du nous en douter : nous sommes beaucoup trop près de la ville. Il s’agit en fait plutôt d’un parc urbain, entouré de villas cachées derrière de grands portails d’où sortent des voitures très chères. Des coureurs, cyclistes et promeneurs passent devant nous toute la soirée. Nous trouvons un endroit caché sous des arbres et une fois la nuit tombée, nous montons la tente. Premier bivouac du voyage et un des plus improbables. Le deuxième bivouac improbable sera celui d’Orio, le lendemain soir. Après un peu de recherche, nous trouvons finalement un des rares endroits plats et cachés du secteur. L’autoroute ne passe pas très loin, mais tant pis. Mauvaise pioche : à minuit, des gens s’installent à quelques mètres de nous et sortent bouteilles et enceintes bluetooth. Ils ne nous voient pas, mais nous les entendons. Au bout d’un moment, comprenant qu’ils ne sont pas près de partir, nous préférons ranger la tente et décamper. Nous finissons la nuit dans nos hamacs, quelques centaines de mètres plus loin.
Les jours suivant sur la côte, nous roulons finalement beaucoup sur du bitume. Le camino del norte est souvent impraticable avec nos vélos lourds et chargés : beaucoup d’escaliers notamment, que nous sommes obligés de contourner. Mais la conduite très détendue et respectueuse des automobilistes espagnols, la bienveillance des gens que nous croisons et les pauses baignades quotidiennes rendent le voyage très agréable. Les villages et petites villes côtières se succèdent : enfants qui escaladent les bateaux de pêche pour sauter dans l’eau, chantiers navals, conserveries : la mer fait vivre du monde par ici, et pas seulement par le tourisme.
Après Ondarroa, la région devient vraiment rurale. La route côtière, pratiquement vide de voitures, sinue à travers des forêts d’eucalyptus. A Lekeitio on nous prévient : pour aller à Guernika, il ne faut surtout pas suivre la route côtière, beaucoup trop dure ! Mieux vaut rouler sur la route principale, par les terres, ça va plus vite et c’est plus plat. Oui mais nous on veut voir Ea et Elantxobe. On veut se baigner encore une fois, à la plage de Laga. On veut vérifier si la ria de Mundaka est aussi jolie en vrai que sur la carte. Alors tant pis, on y va. On arrive à Ea au petit matin alors que la ville appartient encore aux chats et aux pêcheurs à la ligne. C’est dimanche, les joueurs de pelote s’échauffent et un marchand ambulant déploie son étal de gâteaux basques, miels et confitures de pays pendant qu’une file se forme à l’unique boulangerie. Après avoir fait le plein, nous entamons l’ascension de la fameuse côte qui faisait si peur aux gens de Lekeitio. Nous la gravissons sous les encouragements des riverains matinaux qui descendent au village. Puis nous redescendons à Elantxobe, à Laga et nous remontons la ria de Mundaka jusqu’à Gernika où nous embarquons nos vélos dans un train de banlieue, direction Bilbao.
Bilbao
On nous avait présenté Bilbao comme une ville industrielle en déclin posée au milieu d’un immense bassin minier. Pas très vendeur. La métropole de plus d’un million d’habitants (environ un quart de la population basque) est bien une des plus grandes d’Espagne, mais sa ville centre a su se relancer dans les années 90 suite à la construction du musée Guggenheim. On parle d’ailleurs d’effet Bilbao pour décrire ce phénomène de villes moroses qui réussissent à retrouver une dynamique grâce à un bâtiment prestigieux. Nous n’avons pas visité ce temple de l’art contemporain. Peut-être à tort, mais les sollicitations faites aux passants de faire des dons pour entretenir Puppy, la statue de Jeff Koons, l’un des artistes les plus riches du monde, m’ont écœuré. C’est l’illustration parfaite d’une certaine forme d’art contemporain que je n’apprécie pas. Heureusement en dehors de ce musée, il y a plein de choses à découvrir à Bilbao pour occuper notre journée de repos. En terme de paysage urbain, la ville évoque plus l’Europe du Nord que l’Espagne avec ce fleuve canalisé entouré de tours de verres entre lesquelles passent des péniches chargées de matériaux de construction et autres marchandises. Les quartiers populaires aux vieilles façades décrépies et aux rues animées sont immédiatement juxtaposés à des quartiers modernes où les banques et les hôtels luxueux partagent l’espace avec des malls à l’américaine. Comme en Europe du Nord, on y trouve des food courts et des biergartens. Bilbao, capitale hipster de la péninsule ibérique ? Mais comme nous sommes en Espagne, justement, dans ces food courts on y sert du vin, des pintxos, des tartas de queso et des tommes de brebis de tous âges. Les bars regorgent également d’une offre bon marché et généreuse et nos craintes de ne pas trouver à manger un dimanche soir sont vite dissipées. Notre escapade se transforme en tournée des bars, nous rentrons à l’hôtel tard et bien éméchés. Peut-être pas la meilleure manière d’entamer une étape de repos…
Mon appareil photo étant tombé en panne la veille du départ, toutes les photos de ce voyage on été prises avec un compact argentique ou avec mon téléphone.
Suite de l’histoire ici.
2 réponses sur « Tour du Pays Basque – La côte »
Toujours très agréable à lire. A quand les photos au XT3?
Utilise les simulations de film il y en a de très interessantes. Classique Chrome ou Accros par exemple.
Bonne continuation.
Merci 🙂 pas assez de matière pour le moment pour un article avec les photos du fuji mais ça viendra. Acros pourrait me réconcilier avec le noir et blanc, mais pour la photo nature j’aime bien la couleur quand même 🙂